La législation brésilienne prévoit que l’acte de corruption n’est constitué que s’il est réalisé à l’encontre de l’administration publique, impliquant, par conséquent, des agents publics. Toutefois, la corruption dans le secteur privé est l’un des sujets les plus préoccupants actuellement dans le monde des affaires. En effet, la corruption est toute aussi présente et inquiétante dans le secteur privé que la corruption impliquant l’administration publique.
Le Brésil n’a pas encore légiféré sur ce sujet. Cependant, il est important de noter que peu de pays ont intégré dans leur législation nationale des dispositions permettant la création d’un délit constitué par des actes de corruption commis dans le secteur privé.
Cette décision de légiférer contre la corruption dans le secteur privé a été influencée, entre autres, par la Convention des Nations Unis contre la corruption (« Convention »), dont chacun des États signataires prévoit de prendre des « mesures pour prévenir la corruption impliquant le secteur privé, renforcer les normes de comptabilité et d’audit dans le secteur privé » (articles 12 et 21). La signature de cette convention est notamment intervenue suite à de nombreux cas de corruption dans des compétitions sportives.
La notion française de corruption dans le secteur privé prévoit de manière claire que le délit de corruption sera constitué lorsqu’un individu propose « sans droit, à tout moment, directement ou indirectement, à une personne qui, sans être dépositaire de l'autorité publique, ni chargée d'une mission de service public, ni investie d'un mandat électif publicexerce, dans le cadre d'une activité professionnelle ou sociale, une fonction de direction ou un travail pour une personne physique ou morale ou pour un organisme quelconque, des offres, des promesses, des dons, des présents ou des avantages quelconques, pour elle-même ou pour autrui, pour qu'elle accomplisse ou s'abstienne d'accomplir, ou parce qu'elle a accompli ou s'est abstenue d'accomplir un acte de son activité ou de sa fonction ou facilité par son activité ou sa fonction, en violation de ses obligations légales, contractuelles ou professionnelles ».
Bien que le Brésil se soit engagé à intégrer les mesures de la Convention dans sa législation, le Code Pénal Brésilien ne dispose pas encore d’un quelconque délit de corruption tel qu’il l’a été mentionné dans le paragraphe précédent.
Toutefois, la Commission de réforme du Code Pénal Brésilien a approuvé le projet de loi prévoyant la création d’un délit de corruption dans le secteur privé (PL 455/2016), dans le but d’enrayer la pratique de concurrence déloyale[1]. Les objectifs du législateur dans ce projet visent à protéger la concurrence et le patrimoine des entreprises ainsi qu’à garantir la loyauté dans les relations professionnelles.
Ces mesures visent autant les propriétaires d’entreprises que les collaborateurs et salariés de ces mêmes entreprises, qui, en échange d’un quelconque avantage, violeraient le devoir inhérent à leur fonction. Par conséquent, le crime de corruption dans le secteur privée serait constitué lorsque tout individu ayant la qualité d’associé, de dirigeant, d’administrateur, de salarié ou de collaborateur exige, sollicite, reçoit, offre, promet ou délivre des avantages indus.
Lorsque des entités privées concluent un contrat allant à l’encontre de la loi, impliquant des pots-de-vin, afin d’obtenir des avantages pour elles-même, alors ces entités commettent un crime de corruption dans le secteur privé. Ces relations commerciales, inéquitables et illégales, entravent ainsi la libre concurrence et la capacité de nouvelles entreprises à entrer sur ce marché, retardant et portant préjudice, d’une manière générale, au développement économique du pays.
Cependant, cela ne signifie pas que les entrepreneurs, pendant le délai d’approbation du projet de loi, ne pourront pas se voir opposer une action en responsabilité devant la justice brésilienne. Bien qu’aucune législation spécifique ne soit encore adoptée, certains comportements prévus dans l’avant projet pourraient être d’ores et déjà être constitutifs d’autres crimes tels que par exemple, l’escroquerie, la reproduction illégale, la violation de secret professionnel, le crime contre l’ordre fiscal, la fraude fiscale, le blanchiment d’argent, voir même, l’organisation criminelle.
Il également important de souligner que les entreprises localisées au Brésil, ayant des relations d’affaires avec des entreprises étrangères soumises à une législation en adéquation avec la Convention des Nations Unies et pour lesquelles un délit de corruption dans le secteur privé existe déjà, pourront également voir leur responsabilité engagée en raison de l’extraterritorialité des lois anti-corruption.
Conformément aux lois anti-corruption nationales et internationales, les entreprises se doivent d’investir dans le secteur de l’Éthique et de la Conformité, afin d’appliquer une tolérance zéro pour la commission de tout acte illicite, ainsi que sensibiliser et contrôler leurs collaborateurs. Un département bien structuré et intégré sera en capacité d’accompagner les entreprises dans la mise en place d’un programme de protection contre les actes individuels de leurs employés, leur permettant de disposer de circonstances atténuantes en cas d’actions civiles, administratives et, en fonction de l’origine de la législation anti-corruption applicable, d’actions pénales.
Ainsi, la création d’un département Éthique et Conformité solide permet de contrôler et de prévenir toute situation de risque et d’éviter non seulement tout cas de corruption d’agents publics mais également d’agents du secteur privé, constituant, par conséquent un outil essentiel permettant à l’entreprise de maintenir son niveau de compétitivité sur le marché.
Anne-Catherine Brunschwig e Christina de Aguiar Barbosa
GTLawyers – Rio de Janeiro
[1]Art 1erdu Décret-Loi n°2.848 du 7 décembre 1940 – Code pénal, entre en vigueur an ajoutant l’article suivant : « Corruption privée Art. 196-A. Le fait pour le directeur, l’administrateur, le membre du Conseil ou de l’organe technique, le commissaire aux comptes, le gérant, le préposé, le représentant, l’employé de l’entreprise ou l’institution privée d’exiger, de solliciter, d’accepter ou de recevoir des avantages indus, favorisant ses propres intérêts ou ceux de tiers, directement ou indirectement, ou d’accepter la promesse d’avantages indus afin de de commettre ou d’omettre de réaliser un acte relatif à ses fonctions : Peine – réclusion, de un à quatre ans, et amende. Paragraphe unique. Les mêmes peines sont encourues par celui qui offre, promet, délivre ou paie, directement ou indirectement, l’avantage indus. » Art. 2nd. Cette loi entre en vigueur à la date de sa publication. PL n°455/2016, à l’iniative de la Commission Parlementaire d’enquête de Football 2015.